Une rupture et des relations conflictuelles

Cela dit, il est indéniable qu’il y a eu, à divers moments de l’histoire, rupture dans les relations. La coopération et le bon voisinage ont laissé place à la méfiance, à la construction de préjugés, parfois même à une hostilité ouverte.

L’algonquin Gabriel Commanda, un modèle de collaboration

L’algonquin Gabriel Commanda est assurément inconnu pour la plupart d’entre nous. À Val-d’Or toutefois, il est un personnage célèbre. Les élèves du primaire et du secondaire participent nombreux depuis les dernières années à une marche annuelle qui porte son nom. Gabriel Commanda représente un modèle de bon voisinage et de colla­boration. Jean Ferguson, auteur d’une biographie romancée du personnage (Ferguson, 2003) raconte que « Commanda avait une manière bien personnelle de chercher et de découvrir des veines minérales : (…) Commanda partait seul en canot…rendu au lieu d’exploration, il commençait par une incantation. Ensuite, à l’aide d’un bâton en forme de fourche ansée qu’il avait découpé dans un panache d’orignal, il marchait sur le terrain et, là où il le plantait, on pouvait être sûr de trouver une veine minérale importante. »

Une des rares photos de l’algonquin Gabriel Commanda, trappeur, guide et prospecteur.

Credit photo: Bibliothèque, UQAT

Un recueil des récits de vie des aînés de la communauté algonquine de Pikogan publié en 2011 par des chercheuses de l’Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue (Loiselle et all., 2011) confirme qu’il y a bel et bien eu entraide au tout début entre les Autochtones et les « colons agriculteurs blancs » durant la période de colonisation de la région. Certains de ces aînés déplorent que cette réalité ne soit pas mieux connue. Plusieurs des premiers colons étaient très pauvres, vivaient dans la misère et étaient mal vêtus pour affronter le climat rigoureux de l’Abitibi. L’entraide aurait été mutuelle. Toutefois tel que l’indique l’étude :

Les blessures, les déceptions, voire la frustration des aînés au sujet du morcellement et de la dépossession de leur territoire par le gouvernement est palpable dans les récits recueillis (…). Le mécontentement et la déception des répondants s’expriment davantage à l’égard de la politique du gouvernement que des colons eux-mêmes qui, selon leurs propos, ont aussi souffert de la politique de colonisation, quoique de façon différente des Abitibiwinnik.

Loiselle et all.

Tom Moar de la pointe-bleue : courage et générosité

Les événements sont rapportés dans la revue National Geographic de novembre 1929, à l’époque où les premiers aéroplanes sillonnent les régions nordiques. Un beau matin de janvier de cette même année, le capitaine Kenneth Saunders, accompagné d’un ingénieur et d’un représentant de la Compagnie de la Baie d’Hudson, quitte Roberval en direc­tion du poste de traite situé sur la rivière Ashuapmushuan. À l’atterrissage, c’est la catastrophe. La couverture glacée cède, les passagers ont à peine le temps de sortir de la carlingue et le fuselage se retrouve sou­dainement sous l’eau.

Credit photo: National Geographic, novembre 1929, coll. Pierre Lepage

Credit photo: National Geographic, novembre 1929, coll. Pierre Lepage

Tom Moar de Pointe-Bleue (aujourd’hui Mashteuiatsh) est chargé de ce petit poste de la Compagnie de la Baie d’Hudson. Il porte immédiatement secours à ces infortunés et les accueille dans sa modeste cabane en bois rond où il vit avec sa famille. Sans hésiter, il se porte volontaire pour aller chercher du secours au premier village situé à une centaine de milles plus loin, aux abords du Lac-Saint-Jean. Vingt minutes plus tard, il est déjà en route. Il n’apporte que sa hache, quelques allumettes et un morceau de viande gelée d’orignal. Il fera le voyage à pied, en un temps record de cinq jours, ne dormant que deux nuits dans un abri de fortune, un simple trou dans la neige recouvert de branches de sapin.

Quelques semaines plus tard, l’avion est sorti de l’eau et remis en marche. Le capitaine Saunders et son équipage ne tarissent pas d’éloges à l’égard de l’hospitalité et de la générosité de Tom Moar et sa famille. (Wilson, 1929)

Au début des années 1980, le président du Conseil algonquin de l’Ouest du Québec, Richard Kistabish, rendait publique une lettre de 1941 particulièrement significative, d’un haut fonctionnaire du Service de la Chasse et de la Pêche du ministère des Mines et des Pêcheries du Québec au sujet de la présence non désirée de familles autochtones aux abords de la route reliant Senneterre et Mont-Laurier.

Le 6 mars dernier, Mr. Harold W. McGill, directeur de la Branche des Affaires Indiennes d’Ottawa acceptait les suggestions de notre Département proscrivant le campement de familles indiennes en dedans d’une limite d’un mille de la route. Je ne doute pas que dans le moment les indiens parcourent les endroits propices pour faire la chasse au rat musqué, mais je crois qu’il serait bon que vous les avertissiez qu’une fois la chasse terminée, ils devront se retirer plus à l’intérieur, afin que l’entente soit respectée et qu’aucune famille ne soit sur le bord de la route lorsque le touriste ou le public voyageur commenceront à circuler de façon plus dense.

Kistabish

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