Des organisations autochtones qui ont atteint une pleine maturité

Les Cris et les Inuits dont nous venons d’évoquer brièvement le parcours, de même que les Naskapis qui ont signé, en 1978, la Convention du Nord-Est québécois, ont vu un développement accéléré de leurs organisations. Il en va de même pour les autres nations autochtones du Québec et de leurs institutions respectives. Les chefs de l’Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador (APNQL) ont, entre autres, mis sur pied des organisations sectorielles où l’on trouve, aujourd’hui, des équipes de jeunes particulièrement dynamiques et de plus en plus scolarisés. Des non-autochtones tout aussi engagés œuvrent également au sein de ces équipes. Nous avons évoqué précédemment le nom de plusieurs de ces organisations qui oeuvrent en éducation, santé et services sociaux, développement économique, durable et des ressources humaines et auprès de la jeunesse.

Au sein des conseils de bande des Premières Nations, orientés plus que jamais vers l’action, les projets émergent, les partenariats se construisent et les succès se multiplient. Nous en avons fourni plusieurs exemples dans Des nations à mieux connaître.

Une douce revanche sur l’histoire :
La course de chiens de traineau Ivakkak

Comme évoqué dans Des droits différents à apprivoiser, l’abattage massif des chiens de traineau par les autorités fédérales et provincia­les durant les années 1950 dans les villages inuits, constitue l’une des pages les plus sombres de l’histoire des relations avec ce peuple.

Aujourd’hui cependant, sur la colline, en retrait du village de Kuujjuaq, le visiteur peut voir des enclos regroupant une quantité impressionnante de chiens de traineau qui attendent avec impatience le retour de la saison froide. Au grand plaisir des Inuits du Nunavik, les chiens de traineaux gagnent en popularité depuis plusieurs années. La course Ivakkak en est le témoignage le plus éloquent et représente une douce revanche sur l’histoire.

Une participante déterminée, Minni Ningurruvik partenaire dans la course avec son père Noah de Kangirsuk.

Credit photo: Pierre Dunnigan/Société Makivik

Depuis 2001, la Société Makivik organise cet événement annuel sur un parcours de 400 kilomètres entre les villages de Kangiqsujuaq et de Tasiujaq. Au passage des équipes dans chacun des villages situés sur le parcours de la course, c’est la fête et l’expression d’une grande fierté tant chez les jeunes que chez les adultes.

En milieu urbain, où le nombre d’Autochtones croît de façon importante, comme nous l’avons mentionné dans Des nations à mieux connaître, la mobilisation et l’engagement sont aussi au rendez-vous. En 2008, à titre d’exemple, le Réseau pour la stratégie urbaine de la communauté autochtone de Montréal a vu le jour. En 2017, 900 membres en font partie. Ils sont issus de la communauté autochtone de Montréal, d’organismes du milieu et des deux paliers de gouvernements. Afin d’améliorer la qualité de vie des autochtones de la grande région de Montréal, le réseau offre, en matière de services, une approche de coordination et concertation dans les secteurs suivants : art et culture, communications, employabilité et éducation, santé, services sociaux et jeunesse. (voir à ce sujet, Reseaumtlnetwork)

Vitrine culturelle innue 2018.

Credit photo: Marie-Pier Carré, Institut Tshakapesh

D’autres organismes d’importance ont vu le jour. C’est le cas notamment de Tourisme autochtone Québec qui connait une croissance enviable.

Au sein de la nation innue, l’Institut Tshakapesh (autrefois Institut culturel et éducatif montagnais ICEM) compte, en 2018, une longue feuille de route.

Depuis son inauguration en 1978, Tshakapesh ne cesse d’évoluer. De la mise sur pied d’un Conseil des aînés, en passant par la création d’outils pédagogiques, la formation, la publication de livres, le soutien aux artistes et l’interprétation de la culture innue, l’Institut Tshakapesh contribue à la transmission des savoirs d’une génération à l’autre…

Tshakapesh, 2018

Grand rassemblement annuel des nouveaux diplômés innus du secondaire 2018.

Credit photo:  Adélard Joseph, Institut Tshakapesh

Vouée à la préservation, à la valorisation et au dévelop­pement de la langue et de la culture innue, cette organisation remplit aussi un mandat d’éducation en assurant un soutien pédagogique et administratif aux écoles de sept communautés innues de la Côte-Nord. L’Institut Tshakapesh est également le grand artisan de La ren­contre Québécois-Autochtones : Sous le shaputuan, un programme novateur de sensibilisation aux réalités autochtones en milieu scolaire québécois.

La rencontre québécois-autochtones : sous le shaputuan

En 1998, l’Institut Tshakapesh a répondu avec empressement à l’invitation de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (CDPDJ) d’élaborer et de mettre en œuvre un programme conjoint de sensibilisation aux réalités autochtones en milieu scolaire québécois. Il a fallu faire preuve d’audace dans les moyens pédagogiques utilisés : mise sur pied d’une équipe de tournée, érection d’un campement de rassem­blement (shaputuan), dans la cour des écoles visitées, périodes-classes dans cette grande tente en compagnie d’animateurs innus, spectacle, jeux, souper communautaire, soirée pour les parents et même campement de nuit, tout a été mis en œuvre pour créer un contact sincère et positif pour les élèves. La venue de l’équipe de tournée était aussi une occasion privilégiée pour tenir des ateliers de sensibilisation aux réalités autochtones auprès du personnel des écoles visitées.

Activité sous le shaputuan à l’École secondaire du Tournesol de Windsor en Estrie, novembre 2006.

Credit photo: Pierre Lepage

C’est dans le cadre de ces perfection­nements qu’a été réalisée la présente publication, Mythes et réalités sur les Peuples autochtones, un outil pédagogique qui a reçu un accueil favorable du milieu scolaire et qui est depuis disponible pour le grand public. Sur une période de dix ans, l’entente de coopération entre la CDPDJ et l’Institut Tshakapesh a permis de visiter 85 écoles secondaires à travers le Québec. Durant cette période, grâce à un financement des gouvernements du Québec et du Canada et à une contribution financière minimale des écoles visitées, l’équipe de tournée a accueilli, sous le shaputuan, au-delà de 100 000 élèves et environ 2 500 enseignants ont pu bénéficier d’un perfection­nement. Aujourd’hui encore, l’Institut Tshakapesh assure la poursuite de ce programme plutôt exceptionnel.

En septembre 2018, l’équipe du programme Sous le Shaputuan tenait quatre journées d’activités à l’École Wejgwapniag de Gesgapegiag en Gaspésie. Sur cette photo, un groupe d’élèves mi’gmaq, Mystie et Anastasia (à l’arrière) ainsi que (de gauche à droite) Ocean, Kimora, Parker, Patience et Nancy apprécient grandement, avec leur professeur Hank Gromelski, cette visite particulière de membres de la nation innue.

Credit photo: Mathias Mark

L’équipe du programme éducatif sous le shaputuan de l’Institut Tshakapesh s’est vue décerner en 2017, le Prix Droits et Libertés. De gauche à droite, Kathleen André, Évelyne St-Onge et Marjolaine Tshernish, directrice générale de l’Institut Tshakapesh.

Credit photo: Marjolaine Tshernish, Institut Tshakapesh

Le tourisme autochtone en plein essor

Le tourisme autochtone au Québec est en pleine croissance. Entre 2002 et 2016, le nombre d’entreprises touristiques autochtones a plus que doublé. Annuellement, le tourisme autochtone crée près de 3 500 emplois chez les 11 nations tout en totalisant des retombées économiques de l’ordre de 169 millions de dollars. (Tourisme Autochtone Québec, 2016)

L’authenticité, la culture et les traditions sont au cœur du tourisme autochtone. Ici, Rita Mestokosho à la Maison de la Culture innue d’Ekuanitshit (Mingan), en territoire innu.

Credit photo: TAQ/Luc Leclerc

Les pourvoiries autochtones sont parmi les secteurs d’activités les plus prisés du tourisme autochtone. Ici, les Pourvoiries du Lac Mistissini, en territoire cri.

Credit photo: TAQ/Hooké

La demande des visiteurs pour le tourisme autochtone au Québec évolue tout autant. On pourrait croire de prime abord que la clientèle européenne constitue la majorité des visiteurs. Ce n’est pas le cas même si elle constitue une clientèle majeure et intéressée. Tout comme pour l’Australie et la Colombie-Britannique, deux destinations comparables pour leur tourisme autochtone, la majorité des touristes proviennent du pays d’origine et non de l’international. La clientèle québécoise compte pour 65 % des visiteurs alors que les touristes venus d’Europe, des États-Unis et d’autres pays, représentent 27 % de la clientèle. Désormais, plus de 1,2 million de visiteurs annuellement choisissent d’inclure dans leur voyage une expérience de tourisme autochtone.

Depuis 2002, bien que le Québec ait connu une baisse marquée des investissements de l’ensemble de l’industrie touristique, et une baisse des dépenses touristiques de l’ordre de 7,3 %, le dynamisme des entreprises autochtones a contribué à maintenir, d’année en année, le niveau des retombées économiques dans certaines régions les plus affectées.

Provenance des touristes fréquentant les entreprises autochtones

Clientèle québécoise

64 %

Clientèle européenne

19 %

Clientèle canadienne hors Québec

9 %

Clientèle des États-Unis

3 %

Autres pays

5 %

Source : Tourisme Autochtone Québec, 2016

Le tourisme en milieu autochtone est une occasion privilégiée pour découvrir la richesse et la diversité des Premiers Peuples. Particulièrement en région éloignée, ce secteur d’activités est souvent névralgique au plan du développement socio-économique, tout autant pour l’affirmation et le renforcement d’une identité culturelle distincte.

La découverte des territoires, des grands espaces et la proximité de la nature sont des motifs fréquents pour choisir le tourisme autochtone. Le Nunavik, terre des Inuits, répond parfaitement aux attentes des touristes, qui viennent de partout.

Credit photo: TAQ/Hooké

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