Une longue gestation

Pourtant, comme nous l’avons mentionné dans Un objectif avoué d’assimilation, il fut un temps pas très lointain où s’affirmer en tant que nation et, en plus, revendiquer des droits à ce titre étaient des actes jugés irrecevables. L’assimilation était l’objectif ultime des politiques fédérales. Pour les Premières Nations et les Inuits, il faut remonter au début des années 1970 pour assister à une véritable coupure avec ce passé peu glorieux. C’est à cette époque que la Fraternité nationale des Indiens du Canada et ses organisations provinciales affiliées, dont l’Association des Indiens du Québec, lançaient le Mouvement de prise en charge dans un secteur névralgique pour la survie des Premiers Peuples, celui de l’éducation. Il fallait mettre fin au régime des pensionnats autochtones, outil privilégié d’assimilation. Le mot d’ordre était sans ambiguïté : l’éducation indienne par les Indiens. Rapidement, le Mouvement de prise en charge allait s’étendre à d’autres secteurs d’activités, santé, services sociaux, développement économique, services policiers, etc.

Denise Wylde de la communauté algonquine de Pikogan près d’Amos est la première femme autochtone, au Québec, à devenir policière. On la voit ici à sa graduation en 1986 au Centre de formation du Service de police amérindienne de Pointe-Bleue (Mashteuiatsh) au Lac St-Jean en compagnie de Benoit Bouchard, alors député de Roberval et ministre du gouvernement à la Chambre des Communes.

Credit photo: Collection Denise Wylde

La communauté algonquine de Pikogan, près d’Amos, se considère aujourd’hui mieux outillée pour lutter contre le crime organisé depuis le retour de la policière Annick Wylde (à gauche sur la photo) qui a suivi une formation et a œuvré pendant deux ans au sein de l’Unité mixte d’enquête sur le crime organisé autochtone (UMECO-A) de la Gendarmerie royale du Canada. Cette unité, qui se spécialise dans la lutte contre les organisations crimi- nelles sur les territoires des Premières Nations, est cha- peautée par la GRC qui met en commun ses ressources avec celles de la Sûreté du Québec et des services de police des communautés autochtones. Sur cette photo, prise en 2013, Annick Wylde (à gauche) est accompagnée de sa collègue de travail, Lydiane Caron.

Credit photo: Pierre Lepage

Chez les Inuits, le mouvement de prise en charge s’est véritablement amorcé au début des années 1960 grâce au développement marqué du mouvement coopératif. Les Inuits pouvaient désormais s’impliquer directement dans l’avancement de leurs propres communautés. C’est d’ailleurs au Québec, en 1959, à Kangiqsualujjuaq, qu’une première coopérative inuite était formée. Deux ans plus tard, des coopératives étaient lancées à Kuujjuaq, à Kangirsuk, à Puvirnituq et à Kuujjuarapik au Québec et une autre à Port-Burwell dans les Territoires du Nord-Ouest. (Fédération des coopératives, 2014 : 4) En 1967, les coopératives locales se regroupaient et fondaient la Fédération des coopératives du Nouveau-Québec (FCNQ).

Le mouvement coopératif, un fleuron de l’économie du Nunavik

La Fédération des coopératives du Nouveau-Québec appartient à un groupement de 14 coopératives membres des communautés inuites situées le long des côtes de la Baie d’Hudson et de l’Ungava au Nouveau-Québec (ou Nunavik, tel qu’on le nomme actuellement).

Fédération, 2014

Selon la FCNQ, « Le but principal de chaque coopérative est d’unir la communauté et d’agir en tant que porte-parole de leurs intérêts. » Les coopératives constituent un puissant levier de développement économique et social, ce qui est évident lorsque l’on observe le succès remporté dans de nombreuses activités telles que : la vente au détail, les services bancaires, la poste et les télécommunications, la promotion de l’art inuit, l’hôtellerie et le tourisme, la distribution des approvisionnements en carburant ainsi que les projets de construction de logements et d’écoles.

Credit photo: Tourisme Québec, Heiko Wittenborn

Le mouvement coopératif est maintenant le plus grand employeur non gouvernemental dans la région avec plus de 400 employés à temps plein et 140 employés saisonniers au Nunavik, en plus des 160 employés à temps plein à Montréal. (…) Les coopératives sont gérées exclusivement par le personnel inuit et cri, ce qui assure le maintien de l’expérience acquise dans la communauté. (…) Le commerce géré par le mouvement coopératif du Nunavik a grandi chaque année passant de 1,1 million de dollars en 1967 à 231 millions de dollars en 2013. (…) Ces résultats démontrent clairement que la philosophie coopérative du travail collectif pour se développer en tant que peuple, sans que personne soit oublié, représente une solution rentable et socialement équitable pour le développement futur du Nunavik.

Fédération des coopératives du Nouveau-Québec, 2014

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