Aborder la question sous l’angle du partage

La Convention de la Baie-James et du Nord québécois et la Convention du Nord-Est québécois illustrent bien que les revendications territoriales doivent être abordées sous l’angle du partage et de la coopération, plutôt que sous l’angle de la privation. D’abord, le Québec a beaucoup gagné par ces ententes, sur le plan de l’intégrité de son territoire d’abord, et aussi quant à la possibilité de développer les ressources de ces vastes régions qui représentent près des deux tiers du Québec, soit un peu plus que la superficie de toute la province de l’Ontario. C’est énorme!

Le régime des terres, prévu dans ces traités contemporains, démontre bien que les Québécois sont loin d’y perdre quelque chose. Les terres dites de catégorie 3 représentent plus de 84,3 % de ce vaste territoire. Or, il s’agit de terres publiques accessibles en général à l’ensemble des citoyens. Les Autochtones y ont accès pour y exercer notamment leurs activités de pêche, de chasse et de piégeage comme par le passé, mais sans y détenir un droit exclusif sauf en matière de piégeage. Les droits exclusifs se limitent aux terres dites de catégories 1 et 2, qui représentent à peine 15,8 % du territoire. Et même là, le Québec pourrait utiliser certaines terres (celles de catégorie 2) à des fins de développement, à condition de les remplacer par des terres équivalentes. En somme, chacun semble y trouver son compte.

Le cas des rivières à saumon représente un autre exemple frappant de coopération et d’interdépendance à établir entre la majorité québécoise et les Autochtones. Il existe au Québec plus de 110 rivières à saumon. Comme aucun traité territorial n’a été conclu au Québec avant 1975, on pourrait s’attendre à ce que la majorité des rivières à saumon tant convoitées fassent l’objet de revendications. Or il n’en est rien. Les revendications actuelles ne touchent, en réalité, qu’une dizaine de ces rivières. Est-ce vraiment trop? Et même parmi les rivières visées, l’exercice des droits de pêche ne s’applique, dans plusieurs cas, qu’à une portion du cours d’eau, sans mettre en cause l’accès des autres utilisateurs. Soyons concrets, y a-t-il une différence significative entre une rivière à saumon gérée par le Québec et une autre gérée par les Autochtones, si l’ensemble de la population québécoise continue d’y avoir accès? Encore une fois, chacun y trouve son compte, à condition de partager, bien sûr.

Le partage du territoire

Les terres de catégorie I sont attribuées à chaque communauté crie et inuit pour leur usage exclusif. Elles sont situées au sein même et au pourtour des villages où Cris et Inuits vivent habituellement. Les terres de la catégorie II leur sont contiguës. Elles cons­tituent une ceinture, un domaine exclusif de chasse et de pêche pour les bénéficiaires habitant les terres I. Il s’agit de terres du domaine public qui peuvent être développées à d’autres fins, à condition de remplacer les parcelles touchées par le développement. Quant aux terres de catégorie III, ce sont des terres publiques sur lesquelles les Autochtones ne reçoivent pas un droit d’occupation exclusif, mais où ils peuvent, sans contrainte légale, y poursuivre comme par le passé, à longueur d’année, leurs activités de chasse, de pêche et de piégeage.

Beauchemin, 1992 : 19

Le territoire du Nunavut, le plus important règlement de revendications territoriales au canada

Depuis le 1er avril 1999, le Canada possède un nouveau territoire, le Nunavut, qui signifie dans la langue des Inuits, « notre terre ». Le territoire est gigantesque. Il représente le cinquième du Canada avec une superficie de 2 millions de kilomètres carrés. Sur cette vaste étendue vit, en 2017, une population totale de 35 600 personnes, inuites à plus de 76 %. Le Nunavut comprend 28 collectivités, dont la capitale, Iqaluit qui regroupe 21 % de la population.

La création de ce vaste territoire découle du règlement des revendications territoriales présentées par les Inuits de l’Arctique de l’Est. « L’accord du Nunavut est le plus important règlement des revendications territoriales autochtones jamais conclu au Canada. Il reconnaît aux Inuit du Nunavut le titre de propriété à une région totalisant quelque 360 000 kilomètres carrés dans l’est et le centre de l’Arctique, et précise les règles de propriété ainsi que les mécanismes de gestion des terres, des eaux, des mers et des ressources du nouveau Territoire du Nunavut. La création du Nunavut, territoire distinct doté de son propre gouvernement, remplit une aspiration longtemps entretenue par les Inuit de l’est et du centre de l’Arctique, à savoir la prise en main de leur propre destinée. » (Inuit Tapirisat, 1995 : 12-13)

Le territoire du Nunavut englobe toutes les îles des baies James, d’Hudson et Ungava.

Le territoire est dirigé par « un gouvernement populaire », c’est-à-dire élu par tous les résidants qu’ils soient inuits ou non. Dans les faits cependant, comme les Inuits sont nettement majoritaires, le parlement élu a toutes les chances de refléter leur culture et leurs préoccupations. En 2017, au Nunavut, les trois quarts des Inuits ont moins de 40 ans. La création d’emplois pour ces jeunes est un défi des plus importants. Le coût de la vie est « de deux à trois fois plus élevé que dans le sud du Canada ».

(Sources : Government of Nunavut, 2017; Canada, Affaires autochtones, 2017; Inuit Tapirisat, 1995)

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