Conclure des traités
Au Canada, dans les relations avec les peuples autochtones, il existe deux types de traités : ceux dits de paix et d’amitié et ceux dits territoriaux, c’est-à-dire ceux touchant plus spécifiquement les terres et les titres fonciers.
Dans l’esprit du gouvernement, les traités territoriaux avaient pour objectif d’éliminer tout obstacle à la colonisation et d’inciter les membres des Premières Nations à abandonner leurs terres, leurs modes de vie et à s’assimiler.
Au Québec, on reconnaît l’existence de 11 nations autochtones : Abénaquis (Waban-Aki), Algonquins (Anishnabeg), Atikamekw Nehirowisiwok, Cris (Eeyou), Hurons-Wendat, Inuit, Malécites (Wolastoqiyik), Mi’gmaq (Micmacs), Mohawks (Kanien’kehá:ka), Innus (Montagnais) et Naskapis. Dans tout le Canada, on parle de près d’une soixantaine de nations autochtones.
Montréal fête le 300e anniversaire de la Grande Paix de 1701
Le 4 août 2001, Montréal a été le théâtre de festivités d’envergure visant à souligner le 300e anniversaire de la signature d’un grand traité conclu en 1701 entre le gouverneur Callière, représentant de la Couronne française, les représentants des Cinq Nations iroquoises et ceux de plus d’une trentaine de Premières Nations
Ainsi une personne dira : Je suis de la Première nation naskapie de Kawawachikamach, ou je suis de la Première nation Atikamekw de Manawan ou Première nation Mohawk d’Akwesasne etc. marquant ainsi à la fois sa nation d’appartenance et son lieu d’origine ou de résidence.
Connu sous le nom de Grande Paix de Montréal, ce traité fut un événement grandiose qui a réuni plus de 1 000 ambassadeurs autochtones, dans une ville qui comptait à peine 3 000 habitants. Parmi les principaux artisans de la Grande Paix, il faut souligner le rôle déterminant joué par le chef huron-wendat Kondiaronk. Celui-ci mourut d’ailleurs au cours de l’événement et des funérailles d’État furent célébrées en son honneur.
Dans un ouvrage fouillé sur la Grande Paix de Montréal, l’historien Gilles Havard (1992) révèle de façon admirable ce grand moment des relations franco-amérindiennes. Il s’agit d’un épisode qui méritait d’être réhabilité dans la mémoire collective.
Par traité, il faut comprendre des ententes formelles, des accords entre des nations ou des États qui cherchent à concilier leurs intérêts et leurs aspirations. Les traités ont souvent pris la forme d’alliances militaires où les parties s’engageaient à se soutenir mutuellement et à se porter secours. Plusieurs traités visaient l’arrêt des hostilités, de même que la façon d’établir la paix et les relations amicales. Le commerce était aussi au centre des préoccupations car, dans les luttes que se livrent les grandes puissances coloniales (France, Angleterre, Hollande) pour assurer leur hégémonie sur le territoire, guerre et commerce sont intimement liés. C’est beaucoup plus tard que les traités toucheront les terres autochtones et les titres fonciers. C’est ce que nous verrons dans le chapitre 5.
Dès les premiers contacts, la pratique des alliances et des traités s’est imposée. Pour coloniser les terres et développer le commerce des fourrures, il fallait développer des rapports étroits et harmonieux avec les divers peuples autochtones.
C’est l’expédition française menée au Canada au printemps de 1603 qui aurait donné lieu à la toute première « alliance interculturelle » (Girard et Gagné, 1995). Champlain fit alors la rencontre des Montagnais (qui se nomment aujourd’hui Innus) à la pointe de Saint-Mathieu, près de Tadoussac. Y a-t-il eu alliance, pacte ou véritable traité? Les termes importent peu. Il y a bel et bien eu un engagement mutuel entre les parties. Du côté français, on désirait obtenir l’autorisation de s’établir sur les terres autochtones et organiser le commerce des fourrures pour lequel les Premières Nations cons-tituaient un levier indispensable. Cette autorisation aurait, semble-t-il, été obtenue. En échange, le chef innu Anababijou aurait acquis l’assurance de l’appui militaire des Français dans les campagnes menées par sa nation contre ses ennemis, les Iroquois.
Une telle alliance ne fut pas un événement isolé. Dans les mois qui ont suivi, le roi de France conférait les pouvoirs suivants à son lieutenant général, le sieur des Monts, chargé de le représenter :
Traiter et contracter à même effet paix, alliance et confédération, bonne amitié, correspondance et communication avec lesdits peuples et leurs Princes, ou autres ayant pouvoir et commandement sur eux : Entretenir, garder et soigneusement observer les traités et alliances dont vous conviendrez avec eux : pourvu qu’ils y satisfassent de leur part.
Célébration de la Grande Alliance de 1603
En mai 2003, le village de Baie-Sainte-Catherine près de Tadoussac célébrait la toute première alliance scellée en 1603 entre Samuel de Champlain et le chef innu Anadabidjou. Pour commémorer l’événement, un énorme panache de caribou, œuvre conjointe du sculpteur innu Christophe Fontaine et du sculpteur québécois Pierre Bourgault, s’élève aujourd’hui au cœur du petit village de Baie-Sainte-Catherine.