Une relation fondée sur des alliances et des traités

Conclure des traités! Voilà une façon très ancienne mais aussi très moderne d’établir des relations pacifiques entre peuples et nations. Un traité implique un consentement, une adhésion volontaire, une reconnaissance réciproque et un respect mutuel des parties. En Amérique du Nord, il s’agit d’une pratique bien établie dans l’histoire des relations entre nations européennes et peuples autochtones.

Montréal fête le 300e anniversaire de la Grande Paix de 1701

Le 4 août 2001, Montréal a été le théâtre de festivités d’envergure visant à souligner le 300e anniversaire de la signature d’un grand traité conclu en 1701 entre le gouverneur Callière, représentant de la Couronne française, les représentants des Cinq Nations iroquoises et ceux de plus d’une trentaine de Premières Nations alliées aux Français. Ce traité de paix et d’amitié mettait fin à cent ans de guerres avec les Iroquois.

Connu sous le nom de Grande Paix de Montréal, ce traité fut un événement grandiose qui a réuni plus de 1 000 ambassadeurs autochtones, dans une ville qui comptait à peine 3 000 habitants. Parmi les principaux artisans de la Grande Paix, il faut souligner le rôle déterminant joué par le chef huron-wendat Kondiaronk. Celui-ci mourut d’ailleurs au cours de l’événement et des funérailles d’État furent célébrées en son honneur.

Dans un ouvrage fouillé sur la Grande Paix de Montréal, l’historien Gilles Havard (1992) révèle de façon admirable ce grand moment des relations franco-amérindiennes. Il s’agit d’un épisode qui méritait d’être réhabilité dans la mémoire collective.

Extrait du traité de paix et d’amitié signé à Montréal, le 4 août 1701. Les signes totémiques de 39 Premières Nations figurent au bas du document. On remarquera (au bas à gauche) la signature du chef huron-wendat Kondiaronk surnommé le Rat, grand artisan de la Grande Paix.

Credit photo: Archives nationales du Canada, C 137797

Échange de colliers de wampum entre un chef autochtone et le sieur Louis-Hector de Callière, lors de la cérémonie commémorant le 300e anniversaire de la signature de la Grande Paix de Montréal.

Credit photo: René Fortin, Corporation des fêtes de la Grande Paix de Montréal

Par traité, il faut comprendre des ententes formelles, des accords entre des nations ou des États qui cherchent à concilier leurs intérêts et leurs aspirations. Les traités ont souvent pris la forme d’alliances militaires où les parties s’engageaient à se soutenir mutuellement et à se porter secours. Plusieurs traités visaient l’arrêt des hostilités, de même que la façon d’établir la paix et les relations amicales. Le commerce était aussi au centre des préoccupations car, dans les luttes que se livrent les grandes puissances coloniales (France, Angleterre, Hollande) pour assurer leur hégémonie sur le territoire, guerre et commerce sont intimement liés. C’est beaucoup plus tard que les traités toucheront les terres autochtones et les titres fonciers. C’est ce que nous verrons dans le chapitre 5.

Dès les premiers contacts, la pratique des alliances et des traités s’est imposée. Pour coloniser les terres et développer le commerce des fourrures, il fallait développer des rapports étroits et harmonieux avec les divers peuples autochtones.

C’est l’expédition française menée au Canada au printemps de 1603 qui aurait donné lieu à la toute première « alliance interculturelle » (Girard et Gagné, 1995). Champlain fit alors la rencontre des Montagnais (qui se nomment aujourd’hui Innus) à la pointe de Saint-Mathieu, près de Tadoussac. Y a-t-il eu alliance, pacte ou véritable traité? Les termes importent peu. Il y a bel et bien eu un engagement mutuel entre les parties. Du côté français, on désirait obtenir l’autorisation de s’établir sur les terres autochtones et organiser le commerce des fourrures pour lequel les Premières Nations cons­-tituaient un levier indispensable. Cette autorisation aurait, semble-t-il, été obtenue. En échange, le chef innu Anababijou aurait acquis l’assurance de l’appui militaire des Français dans les campagnes menées par sa nation contre ses ennemis, les Iroquois.

Nicolas Vincent Tsawenhohi, Grand Chef de la Nation huronne-wendat, tenant dans ses mains le collier de wampum qu’il présenta, en 1825 au roi Georges IV d’Angleterre.

Credit photo: Archives nationales du Québec à Québec

Une telle alliance ne fut pas un événement isolé. Dans les mois qui ont suivi, le roi de France conférait les pouvoirs suivants à son lieutenant général, le sieur des Monts, chargé de le représenter :

Traiter et con­trac­ter à même effet paix, alliance et confé­dération, bonne amitié, correspondance et communication avec lesdits peuples et leurs Princes, ou autres ayant pouvoir et com­mandement sur eux : Entretenir, garder et soigneusement observer les traités et alliances dont vous conviendrez avec eux : pourvu qu’ils y satisfassent de leur part.

Lescarbot, cité dans Grant 1911 : 491

Célébration de la Grande Alliance de 1603

En mai 2003, le village de Baie-Sainte-Catherine près de Tadoussac célébrait la toute première alliance scellée en 1603 entre Samuel de Champlain et le chef innu Anadabidjou. Pour commémorer l’événement, un énorme panache de caribou, œuvre conjointe du sculpteur innu Christophe Fontaine et du sculpteur québécois Pierre Bourgault, s’élève aujourd’hui au cœur du petit village de Baie-Sainte-Catherine.

Un immense panache de caribou érigé au cœur du village de Baie-Sainte-Catherine rappelle qu’il y a plus de 400 ans Samuel de Champlain a signé, au nom des Français, une première alliance avec la nation innue.

Credit photo: Pierre Lepage

Les créateurs de cette œuvre magistrale, Pierre Bourgault de St-Jean-Port-Joli et Christophe Fontaine de Uashat (Sept-Îles).

Credit photo: Pierre Lepage

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